Ça commence comme ça:
Après une folle nuit de sexe avec son partenaire du moment, la jeune et jolie Laura se réveille au petit matin avec d’étranges marques sur le corps. La jeune femme n’y prête pas vraiment attention mais son état va toutefois très rapidement empirer. En effet, sa peau commence à se nécroser, ses ongles à tomber et tout son corps dégage une forte odeur de décomposition. Rien ne semble pouvoir enrayer ce phénomène répugnant et, au fur et à mesure que ses chairs se putréfient, la raison de Laura va se mettre à vaciller, la plongeant bientôt dans une véritable folie meurtrière…
Ce que nous en pensons:
Il y a des films qui vous frappent en plein dans l’estomac et vous laissent ensuite cloué dans votre siège comme anesthésié. C’est le cas de Thanatomorphose, un long-métrage trash, glauque, mais surtout terriblement hypnotique et envoutant.
Si de nos jours les œuvres gore ne manquent pas, il est clair qu’aucune ne joue dans la même cour que Thanatomorphose. En effet, plus qu’un film d’horreur, Éric Falardeau nous propose de vivre une expérience unique.
Pour cela, le réalisateur n’hésite pas à nous maltraiter, et cela de plusieurs manières.
Commençons par ce qui saute aux yeux. Éric Falardeau est un jusqu’au-boutiste, cela crève l’écran dans son film. La dégradation physique de la pauvre héroïne est d’un tel réalisme qu’il risque de donner la nausée aux non-initiés. Sa chair se nécrose puis pourrit littéralement, ses ongles tombent, les vers la rongent. Le cinéaste ne nous épargne rien. Nous plaçant ainsi dans une situation des plus inconfortable.
Plus que dans aucun autre film, vous allez vous sentir mal à rester impuissant face à la souffrance de l’héroïne. Éric Falardeau touche ici à l’intime, à notre peur la plus primaire, celle de notre propre décomposition.
Portant, tout cela n’est pas gratuit puisqu’Éric Falardeau a bien un message à faire passer. Cependant, le film étant quasi muet (à peu près une vingtaine de phrases dans tout le long-métrage), c’est au spectateur de se faire sa propre opinion. Ah, que c’est agréable de ne pas avoir une bouillie prémâchée comme le cinéma d’horreur moderne aime à nous la servir. Pour nous, Thanatomorphose est une superbe métaphore filée de la dépression, le réalisateur extériorisant un mal intérieur.
Autre détail créant un certain malaise chez le spectateur, l’appartement lui-même. Le fait que Thanatomorphose soit un huis clos accentue le côté, déjà très, anxiogène du film. De plus, celui-ci semble, à la manière des jeux vidéo Silent Hill, se dégrader en même temps que l’héroïne. Un élément renforçant notre théorie puisqu’en cas de dépression, un « home sweet home », peut devenir angoissant.
Enfin, la photographie dans Thanatomorphose est tout aussi importante que ce dont nous venons de vous parler. Éric Falardeau a volontairement choisi un grain d’image grossier. Une astuce consolidant l’aspect réaliste du long-métrage. Car, paradoxalement, un résultat trop lisse aurait minimisé notre empathie pour l’héroïne en nous rappelant à chaque instant qu’il ne s’agissait que d’un film.
Pour conclure, nous nous devons de parler de la performance de Kayden Rose. L’actrice porte littéralement Thanatomorphose sur ses épaules puisqu’elle est seule dans son appartement durant les 3/4 du film. De même, elle ne dit quasi rien, et pourtant, la jeune comédienne nous fait passer une multitude d’émotions. Nous vous conseillons d’ailleurs d’aller (re)voir ici l’auto-interview qu’Éric Falardeau nous avait consacré et où il évoque le calvaire que Kayden Rose a dû subir pour incarner son personnage.
Si Thanatomorphose est le premier coup de foudre des Petites Chroniques, ce n’est pas un hasard. C’est la première fois en cinq ans de critique qu’un film nous remue autant. D’un point de vue visuel, il est parfait. Les détails de la métamorphose de l’héroïne, la photographie choisie, le décor… absolument tout a été pensé pour servir la puissance du propos d’Éric Falardeau. Et quelle puissance ! Vous allez souffrir en regardant ce long-métrage, mais le jeu en vaut vraiment la chandelle ! Si vous avez le cœur bien accroché, vous vous devez donc de tenter l’expérience Thanatomorphose au moins une fois dans votre vie. Surtout que cette réédition signée, ESC Distribution, a été fabriquée pour magnifier le chef-d’œuvre d’Éric Falardeau.
Les bonus:
- Entretien autour du film avec le réalisateur, Éric Falardeau (22min46 VF)
Une auto-interview où le réalisateur revient sur son parcours avant de glisser sur la genèse de Thanatomorphose. Un excellent segment qui aide à mieux comprendre le processus créatif du cinéaste. (Même si ESC Distribution aurait pu choisir notre auto-interview). - “Thanatomorphose dans le cinéma gore” par Olivier Cachin (12min20 VF)
Le journaliste et écrivain décortique le film de manière très carrée, allant jusqu’à piocher des détails jusque dans le générique. Un segment qui sert aussi d’avertissement pour les spectateurs qui ne saurait pas dans quoi ils s’aventurent. - Séance de questions/ réponses avec Eric Falardeau organisée à la cinémathèque Québécoise en 2023 (9min45 VF)
Tout est dans le titre, le réalisateur répond aux questions de spectateurs suite à une projection. Éric Falardeau s’y dévoile énormément, ses angoisses, ses obsessions… - Making-of (24min15 VF/ VO)
Le meilleur segment du Blu-ray pour ceux, qui, comme nous, sont tombés amoureux de Thanatomorphose. Un making-of en forme de found footage à la fois détendu et drôle, mélangé à une interview d’esric Falardeau. Dommage que les parties en VO ne soient pas sous-titrées. - Bandes-annonces (VOST 1min42)
Des bandes-annonces intrigantes qui montrent le génie d’Éric Falardeau pour le teasing. - Courts métrages
Six courts à l’image de Thanatomorphose à la fois minimalistes et intrigants. Les deux meilleures étant, pour nous, Crépuscule, un film d’animation en stop motion très intéressant et, bien entendu, Asmodeus qui est l’œuvre la plus personnelle d’Éric Falardeau.- La petite mort – 2006 (muet 2min36)
- Purgatory – 2006 (muet 16min34)
- Coming home – 2008 (VF 19min13)
- Crépuscule – 2011 ( muet 19min41)
- Élégie nocturne – 2015 (muet 10min21)
- Asmodeus – 2021 (muet 10min31)
- Asmodeus par Éric Falardeau (VF 6min03)
Dans le même cadre que pour l’auto-interview de Thanatomorphose, le réalisateur nous parle de son court métrage.
Caractéristiques du Blu-Ray/ DVD:
- THANATOMORPHOSE
- De: ÉRIC FALARDEAU
- Avec: KAYDEN ROSE, DAVID TOUSIGNANT, ÉMILE BEAUDRY…
- Nationalité: Québécois
- Genre: Horreur, drame psychologique
- Classification: Déconseillé aux moins de 16 ans
- Durée: 1h40
- Producteur: Thanatofilms
- Distributeur: ESC Distribution
- Date de sortie: 3 janvier 2024
- Prix: Blu-ray édition limité: 19,99€/ DVD: 14,99€
Cette chronique a été réalisée à partir d’un Blu-Ray offert par l’attachée de presse du groupe ESC Distribution .
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